Du grain à moudre #2, s'il vous plaît ! / Un audio, s'il vous plaît !

Pour la radio, un papier social*

*ce texte a été écrit dans le cadre d’un devoir de radio. La consigne était : choisir un sujet d’actualité sociale, l’écrire et l’enregistrer.

Lancement

Suite aux événements dramatiques récents, le suicide de collégiens victimes de harcèlement, Pap Ndiaye, ministre de l’Education Nationale, a demandé dans un courrier envoyé vendredi 9 juin à tous les chefs d’établissement de faire donner « une heure de sensibilisation « Harcèlement et réseaux sociaux » et ce, dès la semaine prochaine.
Rencontre avec l’équipe pédagogique d’un collège rural du Rhône avec notre correspondante locale, Guillemette Loyez

Papier

Au nord du Rhône, à la frontière des départements de la Loire et de la Saône et Loire, se niche un collège rural de 200 élèves, entouré de sapins, principale source de revenus pour ce territoire montagneux à 1h de Mâcon, Lyon ou Roanne.

La vingtaine de professeurs se dispatche entre ce collège rural et d’autres établissements urbains.
Et ici comme ailleurs, les écrans sont très présents dans la vie des collégiens, alors même qu’ils sont entourés de nature et que certains villages sont encore en zone blanche.

Les professeurs documentalistes seraient tout désignés pour prendre en charge cette demande

La professeure documentaliste enseigne l’EMI à raison de 2h par semaine aux 56 élèves de 6ème. C’est le premier objet de sa lettre de mission, l’acquisition par tous les élèves d’une culture de l’information et des médias (développement de l’esprit critique face aux sources de connaissance et d’information ; recherche et maîtrise de l’information).

Suite à la diffusion du courrier du ministre de l’Education nationale en date du 9 juin qui a demandé de faire donner immédiatement une heure de sensibilisation au « harcèlement et réseaux sociaux », elle s’est portée volontaire malgré l’injonction et le délai quant à la préparation d’une telle séance.

Cette demande fait suite aux événements tragiques qui se sont récemment déroulés. En effet, plusieurs collégiens se sont donnés la mort, des drames qui concernent les familles en premier lieu, les établissements dans lesquels ces collégiens étaient scolarisés, et par extension toute la communauté éducative.

En cause, les réseaux sociaux bien sûr, les relations entre collégiens aussi. Ce qui hier se déroulait au sein d’un établissement, et peut-être aux alentours du collège se répand comme une traînée de poudre sur les groupes classes des messageries partagées d’abord pour les devoirs, par extension pour d’autres types d’échanges, et jusque tard dans la nuit trop souvent, jusqu’à se retrouver sur les réseaux sociaux publics

Aujourd’hui il n’existe pas de référent harcèlement, comment faire en sorte que cette sensibilisation ait lieu ?

La demande n’a pas fait l’unanimité au sein du collège où seulement un autre professeur, celui d’histoire géographie pour les élèves de 5ème, 4ème et 3ème, s’est porté volontaire. Sa séance est déjà prête, le sujet a été abordé en vie de classe. Il aura juste besoin de l’adapter, « mais certainement pas pour la semaine prochaine ! ».

Le lundi suivant la professeure documentaliste a reçu le soutien de la professeure d’histoire géographie en charge également de l’Enseignement Moral et Civique pour les 6ème. Ce qui était une demande expresse devient un travail collaboratif des deux professeures qui vont se partager une séance de sensibilisation.

Elles font le job comme elles disent mais elles savent très bien que c’est une goutte d’eau dans un vaste océan dont certaines profondeurs sont bien trop noires. Elles le feront, même si elles sont d’accord avec le syndicat enseignants se-unsa, qui en ce début de semaine où cette heure de sensibilisation devrait avoir lieu » énonce « contre le harcèlement : la mobilisation oui, la précipitation non ! ».

Comment ne pas penser que c’est une mission (pour ne pas dire responsabilité) qui est encore faite sans aucune concertation ?

En relisant leur communiqué, elles apprennent qu’il faudrait aussi nommer un référent harcèlement. Cette fois-ci, le principal ne pourra pas se passer d’un conseil pédagogique pour traiter la question et réfléchir à un projet d’établissement concerté sur un sujet aussi délicat et important, celui-ci reliant vie au collège et à la maison par l’entremise des écrans. Toute la communauté éducative de l’établissement doit se sentir concernée, des enseignants au PsyEn, en passant par le CPE et la vie scolaire, le personnel médical, les AESH et les parents ! L’efficacité de telles mesures résident dans le fait qu’elles soient portées par tous, pour tous.

Une fois encore cela arrive après de dramatiques événements, notamment celui du 12 mai dernier avec le suicide, à son domicile et à seulement 13 ans de Lindsay dans le Pas de Calais. La jeune fille avait subi une vague de harcèlement. Sans oublier Farès en mars, un jeune handicapé de Carcassonne, harcelé par ses camarades et violemment poussé dans les escaliers. Début juin, quatre adolescents sont reconnus coupable de harcèlement contre Lucas, qui s’est donné la mort en janvier 2023 dans les Vosges. Les victimes nombreuses (et souvent silencieuses quand elles ne vont pas jusqu’au pire) sont bien trop nombreuses

C’est donc Internet qui est le responsable ?

Nos vies connectées et ce qui s’y passe sont de la responsabilité de tous, il est temps que le sujet devienne une question de société à part entière pour le gouvernement et tous les acteurs de la communauté éducative.

Rendez-vous à la rentrée prochaine pour découvrir le projet de l’établissement sur ce sujet en particulier. En attendant, des professeurs sont à l’écoute des élèves, sans attendre qu’on leur dise ce qu’il faut faire, car c’est une question d’éducation et de santé publique qui concerne tous les adultes.

Auteur

gfrancoisloyez@lilo.org
Professeure documentaliste, passionnée par les rencontres et les projets qui émergent autour d'un café, je partage mes pépites : lieux, sons, mots, images et personnes.

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C'est la fin...

21 juin 2023