Du grain à moudre #2, s'il vous plaît ! / Un audio, s'il vous plaît !

Pour la radio, un papier économie*

*ce texte a été écrit dans le cadre d’un devoir de radio. La consigne était : choisir un sujet d’actualité économique, l’écrire et l’enregistrer.

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Les ultrariches français moins taxés que les riches. Malgré la progressivité de l’impôt en France, les milliardaires sont moins imposables, c’est ce qui ressort de l’enquête de l’Institut des Politiques Publiques parue le 6 juin 2023.

Guillemette Loyez s’est penchée sur cette épineuse question mathématique tout autant que fiscale.

Papier

Alors que les habitants des derniers départements français (de 55 à 976) ont jusqu’au jeudi 8 juin pour déclarer leurs revenus de 2022, l’IPP (Institut des Politiques Publiques) publie le travail de plusieurs mois d’études qui ne laisse pas indifférent les contribuables.

Réalisée en collaboration avec le fisc, et basée sur les revenus 2016 de ceux que l’on appelle les ultrariches, soit 0,0002 % des foyers fiscaux, l’étude montre que les ultrariches (milliardaires) sont moins taxés que les riches, les millionnaires. Ces derniers sont imposés à 46 % et représentent 0,1 % des plus fortunés. Quant aux milliardaires, au total 75 foyers fiscaux, leur taux est de 26 % (soit 2 % de leur fortune).

Ces chiffres viennent questionner la progressivité de l’impôt en France, qui est calculée en fonction des revenus.

Q1 : La logique voudrait donc que plus leur fortune est élevée, plus leur impôt l’est, non ?

Ce n’est pas un si simple calcul, pour deux raisons.

La première correspond au fait que les ultrariches créent des holdings familiales pour gérer leur fortune, qui se décline en actions et dividendes. Leurs montants ne rentrent pas en compte dans le calcul de l’impôt sur le revenu. Ces sommes ne sont donc pas imposables.

En second lieu, leur fortune est aussi très largement soumise à l’impôt sur les sociétés. Son taux a été abaissé en 2022 à 25 % (contre 33 % en 2016). C’est un effet de l’optimisation fiscale de la loi française.

Q2 : N’y-a-t-il pas lieu de s’interroger sur les enjeux d’une réforme sur l’impôt ?

Depuis 1948, date qui marque l’échec de la première réforme, la question est en effet portée par de nombreux spécialistes.

Aujourd’hui d’imminents chercheurs, comme Emmanuel Farhi (mort en 2020), le plus jeune économiste français dont la spécialité était la macroéconomie avec notamment la question du « rôle dual de l’impôt comme outil de redistribution », s’y attèlent. Il a été un des co-auteurs du Prix Nobel français de l’Economie, Jean Tirole.

D’autre part, Anne-Céline DIDIER, administratrice du Sénat au Conseil des Prélèvements Obligatoires explicite dans un rapport daté de 2015, les enjeux d’une réforme de l’impôt sur les revenus, et les différentes formes possibles. Ce rapport mentionne d’ailleurs que « les nombreux mécanismes de personnalisation et la multiplication des dépenses fiscales rendent cet impôt peu lisible pour le contribuable et contribuent à réduire son assiette, déjà relativement étroite. »

Il semble donc que le contribuable soit loin d’y comprendre quelque chose et que les différences entre ultrariches continuent de se creuser, si personne n’ose enfin s’y atteler sérieusement.

En attendant, il reste un peu moins de 48h aux contribuables de la Meuse à Mayotte pour déclarer leurs revenus. Pas sûr que ce soit dans cette frange de la population qu’on y trouve un des 75 foyers qui ne reverse que 2 % de leur fortune.

Auteur

gfrancoisloyez@lilo.org
Professeure documentaliste, passionnée par les rencontres et les projets qui émergent autour d'un café, je partage mes pépites : lieux, sons, mots, images et personnes.

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